2 janvier 2009
Réveil décidé car le temps est compté aujourd'hui.
Je descend au garage pour sortir la voiture le temps que véronique finisse de se préparer.
Et mince ! d'où sort de 4x4 qui me barre le chemin…
Un des employés de l'auberge qui me regarde puis tente de me guider pour sortir alors qu'a l'évidence il n'y a pas la place pour se faufiler entre ce pilier et le tas de ferraille qui me barre la route prends en pleine face ma hausse de ton quand j'exige qu'on réveille ce propriétaire indélicat. Il n'en fera rien, nous devrons attendre 7h40 que le type en question se présente.
La journée commence difficilement.
Sous la contrainte, nous aurons malgré tout pris le temps pour déjeuner, c'est déjà çà.
Nous faisons route vers Ouarzazate que nous pensions plus rapide à rejoindre, mais découvrons au fur et à mesure de le liaison que le trajet prévu n'est pas aussi roulant que prévu sur ces routes, ou plutôt semi routes – semi pistes.
Nous devons en plus compter sur les arrêts fréquents pour « refaire le plein » de notre réservoir de fortune ; Nous roulons fenêtres ouvertes pour amoindrir l'odeur d'essence et il fait assez froid ce matin.
Attention, véhicule non fumeur !
nous profitons du trajet pour immortaliser ces paysages inconnus et dépaysants.
Il faut trois heures pour rejoindre Ouarzazate.
L'objectif est clair : se refinancer en Dirhams et trouver le secteur des casses dans la zone industrielle.
Je commence à sillonner les chemins de ce secteur avec espoir d'y trouver une casse à la française comme je les connaît, mais je dois vite réviser mon jugement après un premier tour de ces échoppes encore plus délabrées que celles sillonnées à Marrakech.
Ces chemins sont creusés de trous plus gros que les pistes d'hier et véronique et moi nous y sentons de plus en plus mal à l'aise.
Je sélectionne une de ces échoppes et présente la dynamo, le démarreur et le réservoir d'essence que je cherche à ce gars qui ne parle que Marocain. Il me fait comprendre qu'il n'a pas mais semble m'indiquer un endroit où je pourrais trouver. nous y allons ensemble à pied.
Chemin faisant, je deviens l'attraction du secteur et chacun des protagonistes me disent à tour de rôle dans un français télégraphique, mais français tout de même, qu'untel ou untel à les pièces que je recherche.
Je dois sentir le gros pigeon à plumer…
Après de longues minutes pour trouver un démarreur qui à l'essai ne fonctionne pas, je finis par m'esquiver en disant que je reviens avec la voiture car je n'oublie pas que Véronique est restée seule dedans et hors de portée de vue dans ce secteur qui nous refroidis autant l'un que l'autre.
Je décide, et Véronique est de mon avis de pousser un peu plus loin les recherches dans un secteur plus accueillant.
Il me semble avoir vu un empilement de voitures un peu plus loin, nous cherchons un peu plus.
Je trouve le garage en question et formule une nouvelle fois ma demande.
Le patron parle français et me trouve assez rapidement le démarreur idéal et plusieurs régulateurs pour la 4L des cigognes (Camille et Oriane, deux des quatre étudiantes de l'école de sage-femmes de l'hôpital Saint-Antoine à Paris qui participent à ce rallye)
Il n'a pas de dynamo, mais je prends déjà ce qu'il me présente : c'est déjà çà.
Négociation difficile, il voit bien que je suis pressé…
Côté réservoir, le seul qui semble en état sur le toit de cette cabane (ce sont en fait les toilettes), est cisaillé comme le mien.
Pas de bol.
Je m'apprête à sortir et me fait rattraper par un des « intermédiaires » du secteur précédent qui m'a cherché à pied jusqu'ici !
Il me dit ne pas comprendre que je sois parti et que je suis sûr de trouver ce qu'il me faut chez un des marchands de tout à l'heure.
J'ai maintenant bien eu le temps de me faire mon avis sur le « oui oui » Local et refuse tout net d'y retourner.
Je continue mon chemin en laissant sur le bord de la route ce bonhomme un peu trop bienveillant.
Je viens de passer beaucoup de temps pour ce maigre résultat et tourne encore un peu pour trouver si je le peux un réservoir, motif principal de ma venue.
Oh espoir, j'aperçois dans une cour d'entreprise qui vends des bouteilles de gaz, une 4l à l'abandon – je vais tenter ma chance -.
Je regarde le réservoir, il est extérieurement impeccable.
Je tente d'aller voir le patron de cette entreprise, histoire de négocier pour acheter le réservoir de cette voiture à l'état d'épave et franchement oubliée dans cette cour.
Mais je vois ressurgir cet intermédiaire gênant qui en quelques secondes après avoir parlé en Marocain au patron me « casse mon coup » pourtant bien parti dans la négociation.
Tout d'un coup, la 4l n'est plus au patron mais à un ami qu'il faut contacter.
Je me retrouve au milieu de 3 types et d'une grande fresque théâtrale à la « je vais te négocier le coup en contactant un copain »…
J'ai compris désormais, je sens bien le pigeon et à force d'obstination je finis par leur faire annoncer un prix pour le réservoir : 1000 Dirhams ! je fume… Véronique aussi dans la voiture.
Résolu à expédier cette affaire au plus vite et à force d'enchaîner les galères, je suis maintenant très pressé de rejoindre coûte que coûte le fil du rallye.
Ce prix est élevé mais je suis tellement excédé de perdre du temps dans ce secteur inconnu, que pour tourner cette page je dis oui aux arnaqueurs, puis compte devant eux la somme et la confie à Véronique, restée dans la voiture.
Je leur dit « d'abord je démonte » !
Me voici en train de démonter ce réservoir « en or ».
Une vis est grippée et je tente de baisser la goulotte de remplissage pour me faciliter l'accès.
Le manchon caoutchouc se déboîte, je passe mes doigts dans le tube pour mieux le saisir, et… je les trempe dans une épaisse gadoue de sable ! le réservoir en est saturé : inutilisable !
Furax mais réjoui de voir ces vautours dépités quand je range mes outils en leur disant « il est mort ! », je n'ai plus qu'une envie : fuir ce secteur malsain et tant pis pour le réservoir ou la dynamo.
Je prends tout de même pitié pour ce gars qui me colle au train depuis plusieurs heures et fait ma « B.A. » en lui laissant 100 Dirhams : le prix de ma future tranquillité…
L'épisode nous pèse à l'extrême et prenons la route du retour.
Je parcours à peine 2 km pour me rendre compte que le témoin de freins clignote pour signaler une manque de liquide de frein !
Certains jours sont décidément plus difficiles que d'autres.
La fuite est confirmée, une roue arrière est pleine de coulures.
Mon espoir de pouvoir rentrer malgré tout ne résiste pas à la raison, je dois faire réparer ici.
Je retourne voir le garage où j'ai tout de même pu acheter le démarreur car j'avais vu plusieurs mécanos qui ne semblaient pas débordés de travail dans cet établissement tout de même plus accueillant que tous les « boui-boui » que je viens de parcourir.
La prise en charge est immédiate, cela au moins fait plaisir.
Le démontage est rapide et un peu excessif, mais je comprends rapidement qu'ils vont juste changer les clapets du cylindre de frein.
Je connais cette solution économique mais aurais moi-même changé le cylindre complet si j'étais en France.
Je ne dis rien, c'est viable et les gars connaissent visiblement leur travail
Ils me demandent tout de même si je suis d'accord pour attendre 15h00 car la boutique qui vends les pièces ne sera pas ouverte avant.
J'avais presque oublié qu'ici les garages n'ont pas de stock de pièces neuves !
Véronique est à fleur de peau mais nous prenons notre mal en patience.
En habitué, je demande tout de même si que peux faire le tour de la casse pour dénicher un réservoir que j'utiliserais (les mécanos de l'organisation viennent de le suggérer à Camille et Oriane qui le transmettent à Véronique) comme alternative à mon réservoir de 4L quelle qu'en soit l'origine.
Je trouve un réservoir en état, c'est déjà çà !
Alors que nous nous résignons à patienter et cherchons une place ensoleillée pour passer le temps, les 3 mécanos de ce garage nous interpellent depuis leur vestiaire à l'étage en nous disant qu'ils vont manger et nous disent ensuite, venez, venez manger !
Nous n'en revenons pas !, rebondissement, cette invitation nous touche droit au cœur.
Devant tant de sincérité, refus impossible.
J'ai les mains noires de cambouis, j‘enfile à la hâte des gants latex car je le plat à tajine chaud attends déjà sur cette table basse si noire qu'on imagine qu'un carburateur a pu être démonté dessus le matin même…
La bienséance veut que l'on mange avec les mains et en saisissant avec du pain la portion que l'on a juste en face de soi.
Nous mangeons ainsi comme des habitués, le plat composé de pommes de terre et d'un délicieux sauté d'agneau aux petits pois mijoté avec des oignons.
L'ambiance est irréelle, cette parenthèse nous émeut vraiment beaucoup : voici l'hospitalité marocaine dont on parle tant.
Nos soucis s'envolent immédiatement.
Nous réalisons que nos hôtes ont prémédité l'invitation car il y a au moins 6 pains alors qu'ils sont 3, c'est vraiment touchant et nous n'avons rien vu venir.
Désormais restaurés, Véronique profite du soleil qui darde de plus en plus et de mon côté je nettoie le réservoir et le prépare au remontage avec les éléments de celui d'origine, tout s'enchaîne bien.
Le remontage du cylindre de roue se termine j'aide à la purge du circuit.
Facture payée nous reprenons la route vers 17h30.
Nous quittons Ouarzazate contents de l'issue du périple mais encore tendus car il reste beaucoup de route, nous rentrerons encore à la nuit tombée.
Quelques photos tant qu'il fait jour, le secteur mérite vraiment son intérêt pour les décors de cinéma
Le retour sur les routes étroites et l'angoisse d'un manque d'essence à proximité de Foum-Zguid car la pompe locale est à sec nous ferons apprécier le retour avec le groupe.
Cette épopée isolée commence à nous peser, il est temps de revenir au rallye.
Les distances dans le désert semblent toujours plus longues qu'en europe, plus particulièrement la nuit.
Nous aurons tout de même parcouru plus de 350 km avec ce bricolage de fortune en guise de réservoir…
Nous arrivons à l'auberge Iriki vers 21h00.
Je permute les pneus de la voiture au plus vite, installe tout aussi rapidement le fameux réservoir et revisse le câble d'embrayage qui de surcroît s'est tellement desserré que le passage des vitesses est devenu impossible tout juste stationné devant l'auberge (les conséquences du changement express de moteur…).
23h00, nous prenons la route pour rejoindre le bivouac vers 0h30.
Le directeur général de l'organisation fait preuve de bienveillance et viens nous chercher à proximité du bivouac.
Nous sommes contents de rejoindre le groupe, la tente est humide à l'extrême mais ce sera la dernière nuit en extérieur.